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Marrackech express, ou jane Eyre à travers moi...
29 mai 2006

Chapitre 3 Oh ! La galère… Qu’est ce que j’ai

Chapitre 3

Oh ! La galère…

Qu’est ce que j’ai encore fait comme bêtise ? C’est pas possible : y a à peine une minute j’étais chez la vioc à trier ses pelures, j’en ouvre une, et je me retrouve ici avec un mal de tête que même un Exomil proportion éléphantesque ne pourrait apaiser ! Premio : où je suis ? Deuxio : qu’est ce que je fous là ? Tertio : pourquoi ça tombe toujours sur moi ce genre de connerie ? Il fait très noir : soit c’est une cave soit… une cale ? Non, je suis dans un bateau ! J’y crois pas : ça existe encore les bateaux en bois ? Ne vous demandez pas pourquoi j'ai deviné ça avec cette rapidité : je viens de tomber sur un hublot donnant une vue panoramique, et pas du tout paradisiaque, sur des poissons qui à mon "humble" avis, ont dû manger des graines nucléaires : avec leur tête, soit ils viennent de Mars, soit c’est très pollué par ici. Enfin bon, je sais toujours pas où je suis. J’ai un indice, non deux : en fait, soit je suis au bord de la mer, soit je suis en pleine mer. La deuxième possibilité me semble la plus terrifiante. Imaginons seulement que je viens de m'écraser dans un bateau pirate : que vont-ils faire ? Probablement me manger (mais non tu délires là ! Ca doit être la poussière…). Un bateau. Franchement, j’aurais pas pu tomber plus mal, moi qui ai le mal de mer dans mon bain (façon de parler !).

Avant toute chose, il faut que je sorte de ce rafiot. Je savais même pas que mon vocabulaire comptait ce genre de mots. Il faudrait que je me lance dans l’écriture. Comment monter cet escalier. Ben avec tes pieds ! Ce que tu es bête… Non, il y a quand même une petite modalité : sans se mettre de la colle puante partout. Voilà une aventure, ma vieille Iaüle. Première marche : tout va bien (te réjouis pas trop tôt, c’est que la première. Il en reste une bonne vingtaine !). Bon la deuxième, la troisième, la quatri... Merde, qu’est ce que c’est encore ? Un lézard. Un lézard géant ! Non mais faut pas déconner : je suis tombée dans la troisième dimension ou quoi ? Bon, continues à avancer, fait abstraction du lézard : plus que cinq marches et la porte. Arrête de te motiver, tu vas finir par ressembler aux nunuches de Fort Boyard. Alléluia, la porte enfin ! A part le lézard et la colle, il ne m'est rien arrivé.

Purée ! Le loquet est cassé ! Je suis fichue, morte, assassinée sans avoir remangé de Nutella et en n’ayant pas vu le dernier épisode de Buffy. C’est moins grave que d’avoir loupé celui des Totally Spies mais quand même ! Heureusement qu’il est passé la semaine dernière. T'es vraiment trop matérialiste ! T'es peut-être en train de mourir, et tu penses au programme télé ! Encore cette voix ! Ferme là donc un peu et laisse moi être bassement matérialiste si je le veux. Ben, j’ai plus qu’à redescendre et attendre que quelqu’un descende. Ca m'étonnerais mais bon…

Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là, un jour, une semaine, un mois, un an, un siècle… Arrête d’exagérer ! Ca doit faire juste une heure. Pourquoi j'ai pas ma montre ? D'habitude les héroïnes de science fiction ont toujours plein de gadgets. Depuis que je suis coincée là, j’ai pas mal réfléchi et j’ai observé ces poissons. Je suis arrivée à la conclusion que si j’étais encore sur ma planète, les poissons ne seraient pas ainsi, la mer n’aurait pas cette couleur jaune, et le bateau ne serrait pas en bois et recouvert de matière gluante. A part la faim qui me tiraille le ventre, tout va bien. Non, en fait ça va pas du tout : j’ai envie de faire pipi et bien sûr y a pas les toilettes intégrés. Je me vois mal en train de… Eh mais quelqu’un  ouvre la porte !

-    Rentre là dedans, ça t’apprendra !

Ne bouge pas ma vieille, ils ont pas l’air sympa et, à mon avis, si tu leurs dis que t'as envie de pisser, ils te découperons en petits morceaux et te donneront à manger aux poissons mutants.

-    La ferme !

-    Qui est là ?

Mince, j’ai parlé à haute voix.

-    T’es qui ?

-    Personne !

Alors là, je me sens transportée on dirait Orlando Bloom en plus jeune. Quand même, ça fait un choc !

-    Parle, je ne te vois pas. Es-tu un lutin des cales ?

Non pas du tout mon pauvre gars : les fées, c’est pour les films.

-    Je suis près du hublot.

-    Eh ! Mais t’es une fille !

Mon dieu ! Quelle perspicacité !

-    Pourquoi t’es pas avec les autres dans la calle sud ?

J’en sais rien, mais si il y a des toilettes, ça m’intéresse !

-    Enfin heureusement que t’y es pas.

Bon vas-y, demande lui son prénom sinon il va croire que t’es muette.

-    Comment tu t’appelles ?

Mon dieu, ma voix a changée : elle est super aiguë ! Grattement de gorge. Il va croire que t'es une minette…

-    Simanson et toi ?

Quel prénom bizarre. Qu’est ce qu’il attend ? Pourquoi il me regarde comme ça ? Ah, mais ce que t’es gourde ! T’es en train de te foutre la honte pour pas changer !

-    Iaüle.

Quoi ? Ton prénom  est plus bizarre que le mien !

-    On est ou là ?

-    Dans la galère…

-    Oui, je sais qu’on est dans la mouise mais…

-    Non. Pas ce genre de galère : un bateau si tu préfère.

-    Ca aussi je suis au courant. T’as vraiment aucun sens de l’humour !

Non, fait pas la tête !

-    Je plaisante !

-    Qu’est ce que tu fais là ?

Si je lui dis que j’ai ouvert un bouquin et que je me suis retrouvée parachutée ici, il va définitivement me prendre pour une folle. Il ne serait, de toute façon, pas loin de la vérité… Choisies la méthode communicative sinon tu risques vraiment de finir pleine de champignons.

-    Je sais pas trop. Est-on en pleine ou au bord de la mer ? Qui sont ces gens au-dessus ? Que vont-ils faire de toi et de moi si ils me trouvent ?

-    Tu poses beaucoup trop de questions. On est en mer du Kimoliun. Nous arriverons demain soir au port de Pitum. Les hommes du dessus sont les marchands de tritinlum. Ce sont des vendeurs de femmeclaves. S'ils te trouvent, ils te vendront avec les autres au marché de Birme.

-    Eh, du calme ! Ca sort d’où tout ça ? On est plus au Moyen-Âge ! C’est quoi les femmeclaves ?

Pourquoi il me regarde comme si j’avais dis la plus grosse bêtise du monde ?

-    Mais tu sors d’où ? T’es aussi inculte qu’un cluricaune.

-    Quoi tu me parles chinois, et en plus tu m’insultes ? C’est toi qui es bête ! Moi j’ai essayé d’être sympa, ce qui, cela dis, est très rare d’habitude, alors si tu es plus intelligent, dis moi comment on sort d’ici. Je n’aurais ainsi plus à souffrir ta présence.

C’est qui, qui se sent bête maintenant ?

-    C’est pas si simple.

Voila. Maintenant monsieur fait la tête, assis dans son coin. C’est bien fait, il ne fallait pas me provoquer. Et encore, là j'étais soft. Il ne m’a pas dit ce que lui faisait là. Non, ne lui pose pas de questions sinon il va croire que tu es une fille facile. Tu es beaucoup trop curieuse Iaüle… Ah toi ! T’es toujours là ? Mais qui es-tu bon sang ? Quelqu’un qui te sera très utile. C’est ça on verra…

-    Encore en train de parler toute seule ?

Ne réponds pas.

-    Je t’ai pas dis pourquoi je suis enfermé là…

-    Ca m’intéresse plus.

-    Alors à un moment ça t’a intéressée ?

-    Tu le fais exprès ou t’es vraiment un pignouf ?

-    Un quoi ?

-    Ah lala ! C’est toi qui comprends pas ! Comme on dis chez moi : la vengeance est un plat qui se mange froid…

-    Chez moi aussi, on dit ça, mais on ne se venge pas : on laisse ce soin aux brutes, comme les gnipus.

Tais-toi ! Tu vas encore te faire incendier…

-    Alors pourquoi es-tu dans cette calle puante ?

-    Je suis, ou plutôt, j’étais mousse. Maintenant ils vont me manger.

-    Te manger ? Comme dans la chanson ?

Pourquoi est-ce que les mots me sortent aussi vite de la bouche ? Je suis ridicule !

-    Quelle chanson ?

-    Laisse tomber…

-    Je dois laisser tomber quoi ? Je ne tiens rien !

-    C’est une expression : ça veut dire "oublie ce que je viens de dire et te fait pas de nœud au cerveau". Bon, tu réponds à ma question ?

-    Ben, ça y est.

Pourquoi es tu toujours si vindicative ?

-    Ils vont te manger, mais ce sont des barbares !

-    Non, des marchands de tritinlum.

-    Mais des commerçants ne sont pas cannibales ?

-    Ce ne sont pas des commerçants. Mais d’où viens-tu pour ne rien connaître du monde ?

-    Tu veux la vérité ? Tu vas l’avoir, mais si tu fais un seul commentaire je t’égorge.

-    Je t’écoute, de toute façon y a rien d’autre à faire.

-    Voilà, c’est terminé. Et je suis coincée ici avec toi.

-    Un livre magique tu dis ? C’est bien la première fois que j’entends pareille légende !

-    Ce n’est pas une légende, c’est la vérité !

-    Je n’ai pas dis le contraire : si tu viens d’un autre monde, bon nombre des mots de vocabulaire que nous utilisons ne doivent pas avoir la même signification pour toi et moi. Je comprends maintenant mieux ton incrédulité et la mienne.

-    Ouais. Ca n’explique pas tes insultes…

-    Je m’excuse. Laisse moi t’expliquer, si tu veux.

-    Bon, à moi de t’écouter.

Au moins, maintenant tu t’ennuies plus toute seule dans ce lugubre endroit.

-    Les marchands de tritinlum ne sont pas vraiment humains. Ils viennent du nord et sont très sanguinaires, ils tiennent certainement ce trait de caractère de leurs ancêtres, les barbares De Trytte mais ils tiennent leur nom d’un marchand. Le père de leur peuple était  un commerçant du pays de Kimoliun. Celui-ci est tombé amoureux de la fille du roi barbare, la princesse Mab. Le roi des barbares s’était marié avec une fée Meiga, et leur fille était très belle. Malgré leur cruauté, les barbares sont des hommes d’une extrême beauté. Tu sais maintenant qui sont ces hommes.

-    Et les gnipus ?

-    Des entrehumains de l’est. Fait pas cette tête ! Des entrehumains sont des créatures mi-homme, mi-féeriques. Ils ont, comme les barbares, des racines humaines et des racines elfiques : ce sont les fils des Dames Vertes et des descendant de Doral, un des frères Doriomo. Les frères Doriomo sont les premiers hommes arrivés dans les terres du Kimoliun. Très vite ils ont découverts d’autres terres et les ont partagées en quatre royaumes : celui de Kimoliun, des Birmaniens, de Kirchmoi et de Timancy. Aujourd’hui ils sont séparés en bien plus de territoires mais c’est un peu compliqué. Toujours est-il que les gnipus, à force de se marier entre eux, sont devenus totalement bête et ne pensent  qu’à se battre.

-    Et les cluricaunes ?

-    Ce sont des êtres des caves. Ils sont bêtes. On s’en sert comme insulte… Mais je me suis déjà excusé !

-    Oui, tu es tout pardonné.

-    Maintenant nous devons réfléchir à notre évasion. Dehors la nuit est tombée. Mais nous sommes encore loin du port.

-    La porte est infranchissable de l’intérieur.

-    Oui, je sais.

-    Si tu sais déjà tout…

-    Non, ne recommence pas ! Si nous voulons sortir, il nous faudra nous entendre et être discrets. Voilà ce que nous allons faire.

La nuit a été longue. Simanson dort encore alors que je suis restée l’oeil ouvert, guettant tout bruit suspect. Les pas provenant du pont s’étaient atténués, mais, depuis quelques minutes, ont repris. J’en conclu que le jour doit être levé.

-    T’es déjà réveillée ?

-    J’ai pas dormi de la nuit.

-    La première nuit dans une galère est toujours fatigante.

-    Tu m’étonnes : avec toi qui ronfle comme une chaudière et ce foutu lézard !

-    Quel lézard ?

-    Celui-là.

-    Ce n’est pas un simple lézard : c’est un pentogrim ! Mais c’est génial !

-    Je vois pas ce que ça a de génial…

-    Les pentogrims sont des êtres magiques et bienveillants. Je sais maintenant pourquoi il y a de la matière gluante et collante partout. Je comprends mieux…

-    C’est quoi le rapport ?

-    Ben… C’est un peu dégoûtant…

-    Dis toujours : je suis plus à ça près !

-    C’est sa matière féc…

-    Non ne dis rien ! J’ai compris. C’est de la crotte de pentogrim. C’est vraiment immonde ! Mais où as-tu appris toutes ses choses ? Dans une école ?

-    Pas vraiment : les écoles sont réservées aux riches, disons que j’ai appris ça tout seul. Tu te souviens encore de notre plan ? Es-tu toujours d’accord ?

-    Je sais pas trop… J’ai bien réfléchi : maintenant je trouve ça répugnant.

-    T’inquiètes : tu pourras te laver après. Ne parlons plus. Il faut attendre maintenant.

Il en a de bonne ! Quand je pense que j’ai accepté ! Je préférerais presque être vendue maintenant. Quoique, être esclave ne doit pas être très épanouissant. Sur terre, j’étais esclave de la télé : je préférais. Après tout ce que je viens d’apprendre sur ce monde, il me paraît terrifiant. Et je ne comprends toujours pas pourquoi le sort s’acharne sur moi. Mais maintenant il y a tout de même un point positif : Simanson. Il est peut-être pas super sympa mais je ne suis plus toute seule. Et je pourrai passer mes nerfs sur lui…

Toute une journée à attendre… Je ne sens même plus l’odeur putride du pentogrim ! Heureusement, parce que sinon je laissais vraiment tomber Simanson. Ce qu’il y a quand même de pénible avec lui, c’est que si je ne pose aucune question, il ne parle pas. Il émet de temps en temps des borborygmes étranges, mais c’est tout. Il ne paraît pas vraiment humain. Mais d’après ce que j’ai compris, la plupart des gens sont des entrehumains. La seule race vraiment humaine habite l'Île d’Irgon. Je n’ai pas creusé le sujet : il n’avait pas l’air très enthousiaste. D’ailleurs il m’a dit  « laisse tomber »…

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